Culture ibérique des oliviers, la “croissance verte” s’assèche

Publié le Aucun commentaire sur Culture ibérique des oliviers, la “croissance verte” s’assèche

C’est la lecture d’une énième communication marketing sur Linkedin d’une entreprise proposant des produits alimentaires bio ou locaux qui a motivé l’écriture de ce post.

D’une façon aujourd’hui assez commune, l’entreprise y parait ses produits de 1000 vertus grâce à la baguette magique de la lutte contre le réchauffement climatique. 

La mariée était belle…

Et pour ne laisser aucun doute aux consommateurs quant à la réalité de sa conscience écologique, l’auteur déplorait la disparition éventuelle des oliviers séculaires de l’Espagne suite aux sécheresses…

À grands renforts de lamentations, l’auteur concluait d’un dramatique et définitif “mais qu’allons nous laisser à nos enfants…”

À ce moment-là, on était passé du mariage à l’enterrement, celui de notre belle planète… Ma pov’ dame, yapu de saison, yapu de pluie, yapu d’oliviers….  

Voici donc l’occasion toute trouvée de revenir sur le sujet de la culture des oliviers en Espagne… puisque le communicant de cette entreprise de produits bio et locaux semble, à raison, s’y intéresser.

Démocratisation de l’huile d’olive : le bonheur des uns fait le malheur de la planète

Nous sommes chez Baxel, deux rédacteurs qui ont vécu leur enfance dans les années 80/90. L’un dans une famille de cadres, l’autre ouvrière. Un de nos points communs est que l’huile d’olive à cette époque n’était pas un membre permanent de la famille de condiments utilisés pour la cuisine du quotidien. Produit cher et de luxe, elle n’était utilisée que très rarement… alors qu’elle est aujourd’hui accessible pour une majorité. 

Si les foyers français consomment désormais de l’huile d’olive relativement bon marché, c’est notamment grâce à la mondialisation et au développement de la production d’huile d’olive en Espagne.

La pays de Cervantes est le premier producteur mondial avec une production qui a été multipliée par plus de 2,5 ces 30 dernières années. 

Avec l’essor des exportations, cela a fait la fortune des producteurs espagnols d’huile d’olive (enfin certains en tout cas). À eux les châteaux en Espagne…

Mais tout cela a un prix : densification des cultures pour accroître les rendements, accaparement des ressources en eau que ce soit via des retenues d’eau, les pompages sauvages des nappes phréatiques, etc.

Au passage, au rythme où vont les choses, l’olivier centenaire est bien parti pour devenir un mythe. L’amélioration des rendements est obtenue en augmentant le nombre d’oliviers à l’hectare. La densité traditionnelle de 60-100 arbres/ha est multipliée par 2, 3… jusqu’à plus de 10. Dans ces conditions, les oliviers finissent par se phagocyter et… sont généralement arrachés au bout d’une dizaine d’années.

Avec la raréfaction de la ressource en eau et pour continuer d’exploiter ces cultures toujours plus nombreuses et consommatrices d’eau, les technologies se sont développées : irrigation au goutte à goutte, usines de dessalement de l’eau de mer, etc. Je ne parle même pas des émissions de gaz à effet de serre associées… d’autres l’ont déjà fait depuis longtemps.

Résultats, une croissance des revenus grâce à l’agriculture dans une zone à priori désertique, ou quasi, et un coût de l’huile d’olive toujours plus bas pour le bonheur des classes moyennes des pays développés/riches (ou des fruits et légumes, même si parfois au prix de quelques “petits” arrangements avec la législation sur le travail, notamment des saisonniers).

Et comme il n’y a pas que les histoires d’amour qui finissent mal en général… patatras, les 2 à 3 dernières années de sécheresse historique viennent percuter de plein fouet cet emblème de croissance vertueuse… 

Ces shadoks ibériques peuvent bien continuer à pomper….quand il n’y a plus d’eau, ben y en a pu. 

Pourtant ce n’est pas comme s’ils étaient pris par surprise. Il y a une quinzaine d’années déjà des scientifiques du climat étaient venus sur leurs terres expliquer que les sécheresses du pourtour méditerranéen étaient le nouveau normal et la conséquence du réchauffement climatique.

Alors on pourra bien tirer la pelote un peu plus, en ajoutant quelques puces électroniques végétales nouvelles générations pour optimiser le goutte à goutte, ou quelques usines de dessalement, mais comme prévenait la ministre espagnole de l’environnement, en nombre limité car les rejets d’eau saumâtre viennent polluer les côtes.

Nature is a B.I.T.C.H…

“There is no free lunch” comme on dit en bon français

Nos voisins anglais ont cette expression “there is no free lunch”, en d’autres termes, tout finit toujours par se payer d’une façon ou d’une autre, rien n’est gratuit.

Contrairement à ce que raconte le communicant de l’entreprise de produits bio qui nous a donné l’idée de ce post, ce ne sont pas les oliviers séculaires andalous qui sont amenés à disparaître… mais les xx millions qui ont été ajoutés pour exploiter/rentabiliser au maximum cet or vert aujourd’hui présent dans un grand nombre de cuisines françaises (et d’ailleurs).

Cette disparition risque de signer la fin de l’huile d’olive bon marché pour les consommateurs et la fin d’un secteur qui a préféré la croissance à tout prix plutôt que la gestion de ses ressources naturelles. Bien entendu c’est l’ensemble de la société qui en supporte les conséquences, pénuries d’eau, sols inutilisables, chômage, etc.

La culture de l’olivier en Espagne illustre ce conte de fée de la  “croissance verte”, un concept qui prétend augmenter le bien-être matériel des personnes tout en baissant leur empreinte environnementale.

Et ce n’est pas en proposant un nouveau produit tendance (toujours plus de croissance) à portée de clic, comme le fait notre marketeur initial, fut-il bio ou local, que l’empreinte environnementale de nos modes de vie va nécessairement baisser…. parfois l’intuition ou le bon sens ne sont pas de bons conseils.

À ce sujet voici un article qui déconstruit quelques idées reçues sur les bienfaits environnementaux de telle ou telle action. Non pas que ce soit un modèle à suivre, après tout l’auteure annonce la couleur dès le début ’“un repas qui prend plus de dix minutes est un repas qui ne vaut pas la peine d’être pris” 🙂 ce n’est pas trop la politique de la maison ici. 

Si ce post vous a semblé utile, merci de liker et partager, cela nous aide dans notre travail !

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

20 − 16 =

error

Vous avez aimé la visite ? Merci de partager !